Les "bonnes pratiques" visant à diminuer notre empreinte écologique sont devenues des mots d'ordre du quotidien. Les pouvoirs publics institutionnalisent et normalisent les "éco-gestes", sur lesquels capitalisent des entreprises. Mais leur succès relatif invite à s'interroger sur les contradictions que leur multiplication engendre. Ces injonctions, héritées d'une institutionnalisation de différentes régulations de l'écologie, reposant tantôt sur les collectifs ou les individus, l'Etat ou le marché, produisent un empilement normatif problématique. L'institutionnalisation de "l'écologie des petits gestes" cohabite avec, voire se heurte à des logiques qui lui préexistent, mine l'action politique et militante écologiste, et étend l'emprise du marché sur les mondes associatifs et professionnels. Ce dossier l'illustre, en complément des travaux sur l'écologisation de l'action publique, le gouvernement des conduites ou encore la réception par les publics : l'activisme militant au sein des marches pour le climat se divise sur lie "eco-gestes" (Giuseppe Cugnata, Maxime Gaborit et Yann Le Lann), les militants des circuits courts sont marginalisés face aux injonctions de la "consommation responsable " (Gabriel Montreux), l'aide alimentaire est soumise à l'immixtion des impératifs de l'ami-gaspillage (Tom Beurois), et le compostage se trouve en proie à sa marchandisation (Maud Hetzel). Aussi l'écologie au quotidien aboutit-elle a fragmenter ou à déstabiliser les secteurs de l'action environnementale qu'elle prétend soutenir.