Après la guerre, les urgences se bousculent. Reconstruire, gouverner, juger, se projeter à nouveau. Entre ces priorités difficiles à départager, une question s'immisce : comment passer de l'événement au récit quand il s'agit de dire l'horreur, l'abject, l'inavouable ? Comment favoriser l'émergence d'un récit commun qui fasse une place à toutes les parties en dépit des conflits qui les ont déchirées ? Telles sont les questions qui balisent un pan des recherches consacrées à l'après-guerre. Le terrain est en grande partie défriché. Il est traversé par une question fondamentale : peut-on "réparer l'histoire" ? L'interrogation est à la fois politique et morale. Elle se décline sur tous les tons : comment "rectifier" , "compenser" , "restituer" après le crime ? Comment prendre au sérieux l'injustice passée ? Ce questionnement prend l'allure d'un défi qui s'apparente plus à un horizon d'attentes qu'à un plan stratégique - le premier demeurant dans le paysage, tandis que le second est en principe susceptible d'être atteint.