Depuis trois décennies, les travaux sur la conscience et les usages de ce concept se sont à l'évidence multipliés. D'une part, il s'agit de propositions qui émanent du champ de la philosophie de l'esprit. Sans être dénuées de lien avec la tradition philosophique, elles coïncident avec un renouvellement important du traitement de cette thématique, qu'il s'agisse de nouvelles distinctions entre des types de conscience (comme la distinction entre conscience d'accès et conscience phénoménale), de nouvelles théories de la nature de la conscience (théorie d'ordre supérieur, théorie auto-représentationnelle) ou de nouvelles solutions au problème que pose la subjectivité consciente à une ontologie physicaliste, du fait du fossé qui semble empêcher de rendre compte des propriétés de la première à partir des ressources qu'offre la seconde en matière d'explication. D'autre part, au-delà de la contribution de la psychologie et de la psychopathologie à l'étude de la conscience et de ses limites, la conscience est devenue un objet d'étude pluridisciplinaire (qu'on pense à l'abondante littérature sur les corrélats neuraux de la conscience), dont le traitement peut être entièrement dissocié de l'activité philosophique. Enfin, lorsqu'il s'agit de fonder nos obligations vis-à-vis des animaux, ou les droits qu'il convient de leur accorder, il est désormais courant de faire appel aux concepts de conscience ou de sentience pour caractériser ce qui motive le souci de leur condition et de leur bien-être. Le présent appel à contributions invite à explorer deux thématiques. La première est celle des critères qu'on peut retenir en matière d'attribution non arbitraire de formes ou d'états de conscience à des êtres qui ne nous ressemblent pas (organismes non-humains, machines, organoïdes cérébraux, formes de vie extra-terrestre). Une question qui se pose à ce sujet est celle de la possibilité de parvenir à des décisions consensuelles en ce qui concerne une telle attribution, ou des raisons pour lesquelles un tel consensus doit demeurer durablement hors de portée. La seconde thématique est celle des relations possibles entre la philosophie et d'autres types de discours rationnels sur la conscience : faut-il parler de complémentarité ou de dialogue, et dans chaque cas, sous quelle forme ?