La question controversée du statut des groupes a été posée de manière récurrente dans les sciences sociales depuis leur naissance, et notamment en sciences politiques. Dans sa formulation la plus élémentaire, la controverse oppose deux positions tranchées : l'une estime que l'existence propre des groupes doit être reconnue et que sa prise en compte est nécessaire à l'intelligence des phénomènes politiques ; l'autre considère que l'invocation de "groupes" n'est qu'une commodité de langage et que la description fine et l'explication des phénomènes doivent s'appuyer sur les seuls individus humains et leurs relations. Cette controverse a le plus souvent été formulée en termes méthodologiques, mais l'opposition des méthodes est indissociable d'une opposition entre ontologies. Ce numéro montre que les termes du débat ont connu un changement aussi- important qu'intéressant depuis une vingtaine d'années, en particulier dans le domaine de la théorie politique. Cette évolution, qui est indissociable d'une nouvelle articulation entre philosophie et sciences sociales, a porté de nouvelles manières de penser les groupes. Parmi celles-ci, la distinction entre collections, groupes nominaux et entités collectives est centrale et constitue le fil rouge des articles rassemblés dans ce numéro.