A Zurich en 1916, le Mouvement Dada, se dégageant tout à la fois du nouvel académisme cubiste, du "progrès" futuriste ou des perspectives surréalistes, élève la plus effervescente et la plus créatrice des protestations. Dépassant la question de l'art, au nom de la vie elle-même, rejouant les formes et le sens de l'art jusqu'à en appeler à sa réalisation, Dada le questionne dans son propre langage, démonte et remonte les mécanismes de la représentation et de la vie. Le Mouvement Dada, actif à New York, Berlin, Barcelone et Paris, compte des fondateurs (Tzara, Arp, Picabia, Duchamp, Man Ray, Huelsenbeck), des amis de la première heure (Hausmann, Schwitters, Ribemont-Dessaignes, Satie), des ralliements non négligeables (Aragon, Breton, Soupault), des précurseurs prestigieux (Apollinaire) ou mythiques (Cravan, Vaché) et des personnages d'autant plus stridents que fugaces, tel Pansaers. Le poète Clément Pansaers (1885-1922) traverse Dada de part en part. Après avoir rejoint les dadaïstes de Paris, redoutant l'institutionnalisation qui guette le groupe parisien, la tâche lui revient de décréter la mort du mouvement. Il s'agit de réévaluer Dada et, par la vertu de la critique (quand elle est dadaïste) de le ramener à son point d'incandescence. Ceci étant fait, ainsi que quelques recueils d'une oeuvre poétique électrisante, Clément Pansaers fait un détour par le Tao, par Joyce et Brancusi, puis passe à sa propre disparition non sans laisser à ses amis l'image d'un poète "grand jusqu'à tuer la poésie par l'action poétique".