Le thème de ce numéro est le savoir, état critique. Aucun savoir n'est plus difficile à définir que celui de l'architecte. Universel sans pour autant?s e réduire à une somme de connaissances, ce savoir est de l'ordre du mythe. Le grand écart qu'il revendique entre la science et l'art ne suffit pas à expliquer son prestige. D'où vient-il et où va-t-il depuis que l'intelligence artificielle défie la pensée humaine ? Le thème de ce numéro est le savoir, état critique. Aucun savoir n'est plus difficile à définir que celui de l'architecte. Universel sans pour autant?se réduire à une somme de connaissances, spécifique mais sans être réductible à un métier, ce savoir est de l'ordre du mythe. Le grand écart qu'il revendique entre la science et l'art ne suffit pas à expliquer son prestige. D'où vient-il, ce savoir que jadis les traités tentaient de rassembler, et où va-t-il depuis que l'intelligence artificielle défie la pensée humaine ? Son évolution au cours des dernières décennies est-elle celle d'une lente érosion, ou bien s'agit-il d'une transformation ? L'école en a-t-elle encore le monopole, ou est-elle désormais dépassée par les mutations du monde ? La recherche, qui prend ce savoir pour objet, livre-t-elle des résultats à la hauteur de ses ambitions ? Quelles sont la place et le rôle des sciences humaines aujourd'hui dans le savoir de l'architecte et dans l'enseignement en atelier ? Le principe d'un développement durable, si souvent invoqué, a-t-il transformé le savoir autant que le marché de la construction ? Telles sont les questions qui inspirent ce numéro du Visiteur. Il s'agit de situer le statut du savoir dans nos sociétés, au-delà de l'architecture. Le regard critique du philosophe, de l'historien et de l'écrivain accompagnera donc celui de l'architecte. Le savoir-faire aurait-il remplacé le savoir, comme l'habileté remplace le talent ? Pour certains, la marchandisation de tout n'est pas compatible avec la défense des savoirs et ceux-ci ne semblent désormais ne survivre que dans des milieux protégés ; peut-on pour autant voir en notre époque un nouveau Moyen Age où le savoir serait retranché derrière les murs des institutions, ou bien exerce-t-il encore une influence sur le cours des choses ? Quels liens le savoir entretient-il avec l'idée de progrès ou avec notre capacité de juger ? L'état critique des savoirs suscite encore bien d'autres questions, en ayant l'architecture pour objet ou en prenant appui sur elle pour observer le monde.