Qu'il procède de l'excès ou du manque, l'illisible met au défi conventions et systèmes explicatifs. Là où l'on attendait la régulation du sens, l'illisible oppose l'opacité à la familiarité des représentations. Est-il dit illisible, voici le texte pris en défaut de signifiante par un lecteur qui croyait disposer d'un "savoir-lire". A moins, précisément, que l'illisible ne soit ce point obscur dans la mise en œuvre de la langue qui fonde la littérature. Loin d'élucider, le texte illisible élude et (se) dérobe. Il déplace, décentre et signe par là même la mise en jeu du sujet dans la langue. Si l'illisible questionne l'intelligible, son opacité est aussi ce qui rend visible le matériau : matérialité du texte, réalité plastique, graphique ou
picturale. C'est au dessin des frontières de l'illisible que
s'attachent les contributions de ce volume, dans le champ
de la littérature, de l'iconographie ou dans une perspective
anthropologique.