Les émeutes ont longtemps été considérées comme des phénomènes infrapolitiques à durée éphémère. A ce titre, elles ne pouvaient acquérir une véritable place dans l'économie des problèmes politiques les plus classiquement traités en sociologie, en anthropologie, en science politique et même en histoire où le diagnostic est pourtant moins vrai. L'émeute n'est pas un phénomène rare, il est même fréquent sur le pourtour méditerranéen qui configure ici notre propos. Les réactions à l'injustice ou à l'intolérable qui émanent des émeutiers se limitent-elles alors à l'instantané et à la violence ou possèdent-elles une trajectoire et une logique propres qui demandent à être élucidées ? Les travaux présentés dans ce numéro ont été réfléchis en amont des évènements révolutionnaires de l'hiver 2010-2011 qui sont venus ricocher dessus. En 2010, nous pensions aux évènements survenus en France en 2005, en Grèce dès 2007, à ceux qui ne cessent jamais dans Territoires occupés, en Egypte, en Irak, en Algérie, en Tunisie et au Maroc. Nous n'avons pas éludé l'événement révolutionnaire français car il était dans notre propos de repérer dans cet historique même ce qui pouvait relever du désir de vivre dans la dignité. Le sillage ouvert depuis 2010 donne encore plus de sens à cette analytique de l'émeute méditerranéenne.