Depuis les années 1980, les technologies de l'information et de la communication (TIC) et le numérique sont entrés à l'école. De nombreuses transformations ont affecté tous les systèmes éducatifs du monde. Ainsi, en France, ces changements se sont traduits par plus d'une dizaine de réformes successives. Mais au-delà des technologies impliquées, des équipements nécessaires et des apprentissages incontournables, le numérique véhicule avec lui des aspects de modernité, d'innovation et d'évidence. Dès lors, est-il encore possible de s'interroger sur les résonances ou dissonances qu'il apporte dans le monde "formaté" de l'école ? C'est ce que propose ce numéro de la revue Hermès en réfléchissant aux nouvelles modalités du face-à-face pédagogique, aux difficultés comme aux idéaux liés à l'entrée du numérique dans l'école, de la maternelle au lycée. Quel est le sens à accorder aux investissements financiers colossaux que ces programmes appellent ? En quoi le métier d'enseignant et le rôle de l'élève ont-ils changé ? Comment l'école s'est-elle organisée face aux géants de l'Internet ou face aux logiques du logiciel libre et des biens communs ? Quelles idéologies traversent ce mouvement, où cohabitent les utopies numériques autant que les promesses de l'immense marché du savoir ? Entre demandes sociales et exigences du marché du travail, que reste-t-il de la dimension critique et revendicative vis-à-vis de l'information ? Chercheurs, penseurs et acteurs examinent ici les logiques à l'oeuvre dans ce domaine et certaines lignes de tension qui le traversent. Le corps enseignant subit des injonctions pour utiliser, intégrer et s'approprier massivement le numérique. Facteur d'émancipation ou d'inégalités, de modernité ou de dépendance aux industries du numérique, la question fait controverse. Les contributions de ce numéro invitent à adopter un regard analytique et critique sur la place de ces nouveaux outils à l'école. Vincent Liquète et Benoît Le Blanc.