Discours fleuves des dictatures ou prose convenue et contournée des politiques de nos
démocraties, la « langue de bois » se retrouve partout et dans des formes et des sens variés. Plus
qu’une simple convention sociale permettant d’atténuer une vérité désagréable, entre politesse et
hypocrisie, la langue de bois, tel le newspeak d’Orwell (1984), sert parfois à énoncer exactement le
contraire de ce qu’elle dit, pour anéantir toute communication. Dans ce numéro d’Hermès, des spécialistes reconnus étudient l’éventail de ces discours, cherchant à définir la ligne de partage qui fait cette langue « de bois », ses modalités de production, et la répartition des rôles entre récepteur et locuteur au cours de ce phénomène. Ce sujet est un enjeu majeur des recherches en sciences de la communication. Car au détour des ces langues de bois apparaissent en effet les ratés du message, les signes de dysfonctionnement des médias. Et l’on s’aperçoit au final que la langue de bois peut, paradoxalement, constituer un des moteurs de la communication, révélateur évident de sa complexité et son originalité.