Ce sont les artistes qui font l'histoire de l'art en premier, en mettant en oeuvre une poétique d'appropriation et dissémination, animée par un esprit d'érudition et d'application, mais aussi et surtout d'amour papillonnes, vénusiennes ou "don-juannes". Tel est le principe fondamental de la théorie de l'art de Daniel Arasse. La première scolie en est que les historiens de l'art n'arrivent jamais qu'en second. La deuxième, qui relève du diagnostic, est que la plupart d'entre eux sont devenus des spécialistes, dont l'esprit de sérieux ne peut que manquer le gai savoir des oeuvres d'art. Redonner à l'histoire de l'art la force majeure de la joie créatrice, érotique et intempestive de la poétique des oeuvres qui, in fine, la fonde, telle est l'ambition, profondément spinoziste et nietzschéenne, de Daniel Arasse. Son "esthétique" formule un seul impératif : "fais joyeusement de l'histoire de l'art, en artiste". Son hsitoire rapprochée des détails intimes - particolare iconique ou dettaglio plastique - du sujet à l'oeuvre dans la chose même -res/rien- de l'art, en prenant la forme d'une "iconographie analytique", trouve son apothéose dans l'étincelante liberté de ton des dialogues enjoués d'On n'y voit rien et de la série radiophonique des Histoires de peintures, avec un succès si vaste que le "Don Juan de la connaissance" de la fable d'Aurore a désormais un visage.