En tant que réserves de biodiversité, les zones humides font aujourd'hui l'objet de larges dispositifs de protection. Mais, sur le terrain, ces mesures heurtent des pratiques de mise en valeur comme des représentations fortement enracinées. En effet, les marais, palus et autres marécages ont résulté de processus de conquête de très long terme. Soutenus politiquement, ils s'inscrivaient dans une logique de peuplement et de sédentarisation. Ces opérations de mise en culture participent-elles pour autant de logiques coloniales ? Ce numéro 203 d'Etudes rurales explore le lien entre zones humides, conquêtes et colonisations de manière concrète dans divers contextes historiques (du XVIe siècle à aujourd'hui) et géographiques (du Proche-Orient au Chili, en passant par le Cameroun et la Californie). Au-delà du fort investissement politique que les zones humides ont suscité, il montre la puissance du rôle des acteurs de terrain engagés dans la transformation des milieux. En considérant les territoires amphibies comme des lieux privilégiés d'expression des pouvoirs, les études réunies révèlent finalement l'extraordinaire plasticité des modèles de conquêtes.