La production de chiffres sur la composition ethnique de la population et, en amont, l'enregistrement dans les recensements de caractères définissant l'ethnicité des individus s'inscrivent historiquement dans la mise en place des régimes politiques fondés sur la souveraineté nationale. Qu'on l'appelle ethnique, des nationalités ou des minorités, cette statistique est continuellement l'objet de conflits politiques, surtout dans la conjoncture particulière que constituent les changements de régime. Sous cet angle encore peu investi, les conflits en question peuvent être étudiés de manière privilégiée à partir de deux attributs majeurs de la statistique : sa fonction d'institution du social, via le recensement, et son usage comme outil de gouvernement.
C'est à travers l'analyse de l'utilisation des statistiques ethniques en Ukraine, Ethiopie, Laos et Iran que Critique Internationale a choisi de participer au débat engagé en France sur la pertinence de catégories ethniques dans l'appareil statistique.