Comprendre le titre de ce premier numéro de la revue Cahiers épistémologiques exige d'une part d'interroger distinctement les notions d'épistémologie et de science dans leur contenu sémantique, et d'autre part de circonscrire les moments de leur conjonction. Les auteurs des textes rassemblés dans ce volume, qui comprennent que toute épistémologie est épistémologie de quelque science, se sont livrés à cette double exigence. En s'appuyant notamment sur la tradition philosophique francophone où l'épistémologie s'entend généralement comme une "théorie de la science", là où la philosophie analytique la définit comme une "théorie de la connaissance", ces textes mettent au jour la difficulté majeure que présente la conjonction de l'épistémologie et de la science, surtout dans la pratique de la philosophie des sciences. Cette difficulté tient au fait que l'épistémologie, qui fait de la science son objet et qui étudie l'émergence des concepts scientifiques aussi bien dans leur contenu historique que dans leur évolution historique, doit aussi se comprendre comme une théorie générale de la connaissance. L'illustration est donnée ici par la brèche ouverte à la tradition épistémologique de la philosophie africaine. Epistémologie et Science se comprend donc ici dans la mesure où l'épistémologie reste et demeure une réflexion critique et évaluative des différentes relations conceptuelles au sein d'une discipline scientifique et de ses soubassements idéologiques et métaphysiques, et des lieux d'émergence des outils conceptuels et méthodologiques. Les auteurs de cet ouvrage ont compris que cet état conduit l'épistémologie - dans sa conjonction à la science et dans son pan évaluatif - à s'interroger sur la portée aussi bien pratique qu'éthique des résultats autant que des méthodes d'action d'une discipline scientifique.