2015 : année des espoirs déçus. Année électorale, mais aucune élection n'eut lieu. Année du dialogue politique national et inclusif, mais qui n'était toujours pas acquis au 31 décembre. Année de la décentralisation, alors que l'autonomie provinciale fut rapidement confisquée par le pouvoir central. Année du renforcement de l'opposition rejointe par d'importantes personnalités politiques, mais cependant déforcée par la politique répressive du Gouvernement. Année marquée par la revendication du respect de la Constitution, mais qui fut contrée par la tentative de la modifier ou par les efforts de "glissement". Année de pacification de l'Est du pays grâce, entre autres, aux opérations Sokola I et Sokola II, bien que les violences n'aient pas cessé, voire se soient intensifiées en certains endroits. L'année donc du questionnement et de la confusion, mais tel n'est pas le cas de la transformation en matière économique et partiellement sociale. En comparaison avec les années 1990, le pays connaît un changement remarquable. Un taux de croissance soutenu depuis une décennie, reflété par l'augmentation de la production dans les secteurs miniers, la construction et les communications, qui a fait diminuer quelque peu la pauvreté des ménages. En outre, la bancarisation (paiement électronique des agents de l'Etat) et la régularité des paiements des salaires ont sans doute amélioré passablement les conditions de vie des fonctionnaires. Les réformes tangibles mises en oeuvre sont, comme tout changement, l'effet de différents facteurs : par exemple, l'appui de la communauté internationale et la rentrée de nouveaux investissements étrangers ainsi que nationaux. Dans ce cadre, il y a le choix par le Gouvernement de s'insérer dans cette globalisation, profitant des atouts en ressources naturelles qu'offre la République démocratique du Congo aux nouveaux venus. Toutefois, cette évolution présente le danger d'une nouvelle forme d'extraversion de cette même croissance. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement a aussi opté, ces dernières années, pour un développement accéléré de l'agriculture, secteur délaissé depuis bientôt trois décennies, entraînant une dépendance accrue aux importations de nourriture de l'étranger. C'est, entre autres, ce pari de "modernisation" qui est analysé dans cette édition 2015 des Conjonctures congolaises. Le problème de fond qui se dessine donc est cette évolution contradictoire entre un développement économique prometteur et un piétinement, ou détérioration, du paysage politique. Cette transformation paradoxale peut fragiliser les acquis timides, mais réels, de la reconstruction du pays.