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Victimes de l'" esthétique des ruines " romantique, les dépôts lapidaires commencent à sortir de l'ombre des caves ou de l'humidité des jardins pour afficher tout leur intérêt scientifique et patrimonial aux yeux des chercheurs et du public. Leur statut reste pourtant problématique puisque ces objets sont par définition isolés de leur contexte et que la connaissance de leur provenance est parfois une recherche en soi. Ainsi, ils peuvent aussi bien avoir fait partie de la décoration d'un édifice encore en élévation qu'être de simples matériaux d'un monument disparu. Qui plus est, les vestiges d'un seul ouvrage sont parfois dispersés dans plusieurs dépôts de statuts différents, tandis qu'un seul lieu peut rassembler des pièces provenant de différents bâtiments. L'abandon et la méconnaissance de ces fonds documentaires semblent heureusement avoir fait long feu. Les exemples des dépôts de Senlis, des abbayes de Jumièges et de Beauport, de l'hôtel-Dieu de Chartres, de l'église Saint-Wulphy de Rue, de l'église collégiale Saint-Evremond de Creil et d'éléments provenant de l'abbaye de Royallieu soulignent en effet la multitude des approches possibles. Les éléments inventoriés peuvent ainsi être envisagés sous un angle géologique orienté vers l'histoire de l'exploitation des matériaux, sous celui de l'histoire de l'art et des techniques de construction, mais aussi être l'objet de considérations muséographiques, avec l'objectif de comprendre la chronologie des constructions et destructions ou de restituer l'apparence d'un monument. Chaque démarche est ainsi amenée à communiquer avec d'autres : la tentative de reconstitution d'un édifice disparu nécessite de recenser les fragments retrouvés en fouille aussi bien que les remplois dans des bâtiments en élévation... Ainsi l'archéologie interroge-t-elle à sa manière les lieux de mémoire.