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Une soixante de prieurés bénédictins ont été fondés dans le Bas-Maine entre la fin du Xe siècle et le début du XIIIe siècle. Sous la responsabilité d'un prieur, dont le rôle paraît essentiel dans la consolidation des établissements, vit une petite communauté de moines (souvent deux ou trois, rarement plus de cinq) qui travaillent à mettre en place des seigneuries monastiques autonomes et assurent les obligations religieuses de leur ordre. Après avoir présenté les origines de ces établissements, le processus de fondation et la mise en place matérielle et les modalités de fonctionnement des prieurés, la majeure partie de cette étude s'attache à répondre à quelques questions simples : pourquoi les abbayes ont-elles délocalisé leurs moines et constitué ces petites entités seigneuriales autonomes ? Quels projets seigneuriaux et religieux poursuivaient-elles ? Pourquoi leurs partenaires laïcs ont-ils accepté, surtout au XIe siècle, de se défaire d'une partie de leurs prérogatives seigneuriales au profit des bénédictins et de leurs prieurés ? Comment expliquer la dissociation qui paraît s'opérer entre les moines et leurs bienfaiteurs laïcs à partir des années 1130 ? Les réponses passent par l'observation des dynamiques géopolitiques à l'oeuvre dans un Bas-Maine où s'affrontent les ambitions angevine, mancelle et normande. Dans ce cadre d'affrontement, les prieurés, loin de rester à l'écart des enjeux séculiers, s'alimentent des rivalités seigneuriales laïques. Ils servent aussi les idéaux réformateurs de bénédictins désireux de monachiser l'espace social. Jusque là restés méconnus dans leur signification géopolitique, les prieurés révèlent ainsi leur importance dans une époque marquée par le flux puis le reflux des pouvoirs locaux (les châtelains) face aux pouvoirs englobant (le roi).