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Il y a des images propres à représenter la honte et, à côté, des images éhontées, enfin des images qui éprouvent, en leurs plis, la honte. Dira-t-on que notre culture se plaît à jouer avec l'impudeur, l'opprobre, l'abjection ? Cherche-t-elle à les piéger ou à les exalter ? Que signifie la tentation du snuff movie : ces films " interdits " qui veulent capter le travail du trépas sur les visages ou dans les postures ultimes, et ainsi porter atteinte à ce qui est au plus profond de l'être, à l'identitaire ? C'est de " la gale de la psyché ", de l'esthétique du laid devenu " trash ", " destroy ", apologie de l'immonde qu'il est ici question. " Rougir de honte " est devenu désuet, quand, aujourd'hui, on peut " mourir de honte " à force d'humiliations ou d'affronts existentiels. La " machine à faire la merde " de Delvoye, les anatomies falsifiées de condamnés à mort dues à G. von Hagens mettent en scène l'homme-détritus, alors que d'autres artistes, se confrontant à la terreur de la psychose ou aux images du Goulag, voire d'Auschwitz, " cet anus du monde ", parviennent, quant à eux, à sublimer le sordide en tragique. Sont étudiées ainsi parmi beaucoup d'autres les œuvres de plasticiens (Zoran Music, David Nebreda), d'écrivains (Chalamov, Tisma), de cinéastes (Bela Tarr, Fassbinder, Haneke, etc.). Aux multiples domaines de l'art s'appliquent les diverses interrogations propres aux sciences humaines : histoire des mentalités, esthétique, psychanalyse. Les réponses semblent contrastées : perte des repères, absence d'idéal, violence contenue dans l'acte de voir, déni de la honte, valorisation du passage à l'acte, transparence de l'intime. En définitive, y aurait-il une émotion spécifique aux images honteuses ? Quels en seraient alors le destin et la fonction ? M.G.