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La science moderne s'est constituée, au début du XVIIe siècle, à partir de deux postulats : la connaissance scientifique est produite par une pluralité d'esprits ; mais elle peut être assimilée intégralement par l'individu - qui fait sien le savoir accumulé et sait méthodiquement l'augmenter. D'où, en philosophie, de Descartes à Husserl, la place décisive du cogito. Aujourd'hui, la science repose sur la coordination de processus hétérogènes, inassimilables dans leur intégralité par un seul individu ; la construction des concepts, l'élaboration des hypothèses et la nature des preuves varient d'une discipline à l'autre ; la distinction entre science et technique n'est plus valide, tant spéculation pure et invention technologique se mêlent ; enfin, le postulat de l'unité anthropologique de l'humanité, de l'universel accès de l'individu au savoir, est battu en brèche par les inacceptables inégalités entre les nations. Dès lors, quel doit être le nouveau rationalisme ?
Bertrand Saint-Sernin, ancien recteur d'académie, est professeur émérite de philosophie des sciences et théorie de la connaissance à l'Université de Paris-Sorbonne (Paris-IV). Il est membre de l'Institut.