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Accusé par un correspondant de considérer sa propre philosophie comme la meilleure de toutes, Spinoza rectifie : il sait seulement qu’est vraie celle qu’il comprend. Mais on ne trouvera chez lui ni réelle thématisation ni véritable définition de l’idée de philosophie, pas plus qu’un programme des connaissances comme s’appliquent à en dresser Bacon, Descartes ou Hobbes. Cet ouvrage enquête alors sur la présence, chez Spinoza, d’une conception précise voire singulière de l’idée de philosophie. Il collecte les indices d’une telle idée conçue comme praxis de distinction ou, selon l’expression Althusser, comme activité de tracer des lignes de démarcation. Mais il établit encore que la philosophie prend elle-même sens en ce geste, et seulement en ce geste, c’est-à-dire par le biais de relations nécessaires avec ce qui a priori n’est pas elle : le vulgaire, l’ignorant, le théologien, le souverain ou même d’autres philosophes. L’idée de philosophie, en d’autres termes, s’autoproduit dans un système de rencontres singulières. En analyser les fruits permet alors de recomposer la nature de la «vraie philosophie» : une pratique de production d’idées et de leur communication. Mais se fait jour, en outre, comme un naturel philosophe, effort s’éprouvant selon une réjouissance propre au «vrai philosophe», déjà sage en vertu de son mouvement de se perfectionner et d’accroître sa puissance.
Professeur agrégé à Paris et docteur en philosophie, Philippe Danino a participé au collectif Fortitude et servitude. Lectures de l’Ethique IV de Spinoza (Kimé, 2003) et co-écrit Le bonheur (Eyrolles, 2010).