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Quoique éclipsée par la figure proéminente d'un héros, la parenté est au coeur de la matière de Bretagne. Or, nous n'insistons peut-être pas assez sur son rôle primordial aussi bien pour l'économie narrative que pour une meilleure compréhension, par le biais de l'imaginaire, d'aspects essentiels de la société médiévale. Les romans arthuriens mettent en scène toutes sortes de familles, touffues comme celle de Lancelot, ou bien restreintes comme celles des vavasseurs ou petits nobles qui font des apparitions fulgurantes. Il y a aussi des lignées sanctifiées comme celle des gardiens du Graal, ou damnées comme la descendance de Modred. C'est pourquoi les structures de parenté forment un cadre privilégié pour la prédestination et l'évolution des personnages. Parfois elles fonctionnent selon de pratiques réelles. Dans certains cas, elles les influencent, ou bien elles s'en écartent entièrement. Les alliances matrimoniales souvent problématiques des romans arthuriens, leurs généalogies complexes, leurs conflits et loyautés d'ordre familial parviennent-ils à nous renseigner mieux sur la société médiévale, la légitimité, la violence, la vie privée, la femme ? Ont-ils juste une valeur littéraire ? Et quelle est la place du mythe païen ou de la pratique chrétienne dans le fonctionnement de la parenté ? Enfin, l'héraldique occupe une place centrale dans l'imaginaire arthurien. Les armoiries, généralement signes d'appartenance à une parentèle, acquièrent des significations multiples et subissent des distorsions. Elles ont une valeur symbolique, marquant des étapes dans le devenir d'un personnage. Leur rôle politique de propagande n'est pas non plus négligeable. L'héraldique sert à la fois de marqueur d'identité ou de masque : elle rattache l'individu à son lignage ou souligne, au contraire, sa spécificité. Les textes, leur contexte ou l'iconographie, pris séparément ou mis en vis-à-vis, peuvent répondre à toutes ces questions, voire en susciter d'autres.