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La ménagerie du pouvoir mobilise souvent une symbolique animalière conventionnelle comme l'atteste l'iconographie politique, qu'elle soit monarchique (lion et cheval), impériale (abeille napoléonienne) ou républicaine (coq gaulois). Au service d'une image, l'animal est également enjeu de pouvoir. L'affirmation du règne politique sur le règne animal se traduit souvent par une logique d'emprise, de violence ou de contrainte. Diabolisé, au coeur de multiples procès tout au long du Moyen Age, l'animal est la cible et la victime d'exactions multiples : chassé, torturé, mis à mort, il témoigne du bon plaisir du prince comme des systèmes idéologiques et des traditions constitutives d'une société à un moment donné. Instrumentalisé par les acteurs politiques, il nourrit aussi bien le rituel de la visite du président de la République au salon de l'agriculture que les campagnes électorales, à l'image de Bo, le chien de Barack Obama, favorisant l'assomption d'un président-sentimental. Happé par la jurisprudence, objet de controverses juridiques portant sur son statut, il est au coeur des politiques mises en oeuvre par l'Etat moderne : érigé en signe extérieur de richesse, il fait l'objet d'une sollicitude renouvelée dont témoignent les mobilisations de défense et de protection des animaux depuis le 19ème siècle ou encore le droit, soucieux de concilier une cohabitation, parfois conflictuelle, entre l'homme et l'animal, obligé d'arbitrer entre visée protectrice et lutte contre les espèces menaçantes ou invasives. Questionner l'ambivalence de ces relations invite alors à prendre en compte l'économie émotionnelle qui régit les sociétés et détermine les critères de l'acceptable et de l'ignoble, du tolérable et de la cruauté. Les liaisons de l'animal et le pouvoir racontent donc une vieille histoire qui n'a rien perdu de son actualité comme l'atteste l'affaire des chiens de Nicolas Sarkozy saccageant le mobilier national. Mais au-delà de l'anecdote, l'animal reste bien au coeur des représentations et des pratiques du pouvoir d'Etat.
Sophie Lambert-Wiber est Maître de conférences en droit privé à l'Université d'Angers. François Hourmant est Maître de conférences en science politique à l'Université d'Angers.