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Saluée dès la fin des années 1960 comme une égérie de l'avant-garde, Kiki Kogelnik n'a toutefois pas rencontré un véritable succès de son vivant. Car, sous couvert d'une proximité stylistique avec le pop art, les thématiques abordées par son travail sont chargées d'inquiétudes. Elle observe que les corps façonnés parla société de consommation s'en trouvent dénaturés. Ils perdent tout relief, jusqu'à devenir des enveloppes vides et interchangeables. Les images de mode ont tout aplati, les êtres sont sagement rangés dans le grand dressing de la ville. Ce qui se passe à l'intérieur est tout aussi effrayant. Les organes peuvent être détachés comme des pièces de rechange, et remplacés pour créer des êtres hybrides, plus tout à fait humains, pas entièrement machines : des cyborgs. Les corps peuvent être soignés ou démontés, envoyés dans l'espace ou dispersés sous les bombes ; c'est l'ambivalence du progrès. Jusqu'à de récentes redécouvertes en histoire de l'art, le pop art a été considéré comme un mouvement presque exclusivement masculin. Le féminisme discret mais résolu de Kogelnik en faisait une figure marginale. Il convient aujourd'hui de réévaluer son travail pionnier, à la fois grave et léger.