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Il y a maintenant plus de trente ans que la contraception est libre en France. Moins longtemps pour l'avortement, qui conserve des adversaires acharnés. On en viendrait à oublier qu'au cours du demi-siècle précédent les partisans du contrôle des naissances ont été fréquemment emprisonnés. Cette répression était d'autant plus dure que ces militants faisaient de la limitation volontaire des naissances une arme contre la misère et l'exploitation, le militarisme et la guerre.
Née en 1890, Jeanne Humbert est entraînée par sa mère, qui abandonna son mari et ses autres enfants pour vivre avec un militant anarchiste. Sa longue vie a été celle de cent combats : pour l'anarchisme, la limitation volontaire des naissances, la liberté sexuelle, le pacifisme... En 1909, elle devient la collaboratrice d'Etienne Humbert, dont elle sera l'une des compagnes, puis l'épouse. Aux côtés de grandes figures de l'anarchisme, des féministes radicales et de nombreuses personnalités rebelles, elle mène le combat des néo-malthusiens de Génération consciente pour la liberté de la contraception et de l'avortement. Comme à Eugène Humbert, ce combat lui vaudra procès et séjours en prison, car la République voulait des enfants, toujours plus d'enfants, pour en faire des ouvriers et des soldats ! La loi de 1920 livra les néo-malthusiens à leurs ennemis : moralistes cléricaux, laïques ou rouges, populationnistes, nationalistes... sans parvenir à les faire céder ni, d'ailleurs, à freiner la baisse de la natalité. Aujourd'hui encore, en France, la propagande pour la limitation des naissances reste interdite par la loi. Jeanne Humbert n'abandonna jamais le combat libertaire, rejoignant par exemple May Picqueray lorsque celle-ci fonda Le Réfractaire en 1974 pour poursuivre l'action de Louis Lecoin. Un combat, comme sa vie nous le rappelle, qui vise à libérer femmes et hommes de l'empire de la nécessité et de la tutelle des puissants.