Cette première monographie française du poète, artiste et photographe hollandais présente l'une des oeuvres les plus étranges et subversives produites dans les années 60 en Europe. "De 1965 – date à laquelle il se procure son premier appareil, un Praktiflex – à la fin des années 70, ce photographe autodidacte va se livrer à une pratique compulsive, obsessionnelle, insatiable, de la prise de vue. Il photographie tout : des femmes, des jambes, des enfants, des vitrines, des scènes de rue, lui-même, et d'autres femmes, des modèles, des étudiantes, des mères de famille, des danseuses, des anonymes, et puis des fragments de corps, des seins, des fesses, des jambes, des nuques… Ses photographies, telles des miroirs sans tain, lui permettent d'atteindre un paradoxe : en se cachant derrière le viseur, il se révèle et affirme sa présence au monde.
Toujours en noir et blanc. En noirs surtout, parfois troubles, épais et toujours lumineux, magnifiés par des tirages aux dimensions inhabituelles pour l'époque, notamment le format 60x80 cm qui lui est cher. Transgressif, hors norme et hors du temps, Fieret malmène l'image et distord le réel à la recherche de "quelque chose de surnaturel, un sentiment d'éternel". L'exposition au BAL présentera 200 tirages d'époque, sauvés de conditions extrêmes de production et d'une vie nomade d'ateliers en abris : obtenus à partir de produits chimiques et de papiers périmés, parfois séchés et brulés à la bougie, exposés délibérément aux accidents de la vie quotidienne – poussière, traces de pas, griffures, déjections de souris ou pigeons –, pour la plupart signés et tamponnés compulsivement par leur auteur, ils portent les marques d'une agression permanente tout en étant les ultimes témoins d'une fulgurance disparue."