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Nous supposons tous qu'il existe une différence de valeur entre une mauvaise chanson de variétés et une sonate de Bach. Cette différence existe-t-elle vraiment ? Et si oui, comment la dire ? D'ailleurs, une sonate, un tableau, une sculpture sont-ils des objets pensants ? Les oeuvres d'art pensent-elles vraiment ? Et comment pourrait-on concevoir une telle pensée, qui n'est pas essentiellement linguistique ? Les premiers chapitres du présent essai se construisent autour de cette constatation : c'est, souvent la sensibilité elle-même qui fonde notre intelligence des choses, comme c'est le cas lorsque nous entendons une mélodie musicale ou lorsque nous rencontrons un visage. La compréhension n'est pas toujours méthodique, ni toujours conceptuelle. Nous ne pensons pas uniquement et seulement avec des mots. De nombreux savoirs sont intuitifs. S'il en est ainsi, il nous faut certainement modifier nos idées communes sur la pensée, sur la conscience, et faire en sorte que nos idées philosophiques prennent en compte le fait que nos impressions elles-mêmes participent parfois de notre intelligence des choses. Ce qui forme déjà un commencement de réponse aux questions initiales : quand pensons-nous ? Une image, un sentiment, une oeuvre d'art sont-elles des choses pensantes ?