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Les empiristes franco-berlinois, au XVIIIe siècle, ne conçoivent pas seulement l'expérience comme l'origine des connaissances humaines, mais encore comme le principe de leur exposition systématique bien fondée : la voie de l'invention, supposée partir du sensible, acquiert le titre de méthode analytique. Cette décision entraîne deux difficultés majeures. 1) L'expérience primitive et principielle ne réside pas dans la passivité d'une sensation introuvable, mais dans le moment où l'esprit s'applique au matériau donné, c'est-à-dire dans la réflexion. Mais il faut savoir ce que cette réflexion, dont les empiristes introduisent le concept en philosophie, révèle de l'esprit qui la met en oeuvre et si elle est susceptible d'une explication réductionniste. 2) Les critiques que formule Leibniz et qui se feront entendre jusqu'au XXe siècle semblent définitives : les sciences mathématiques sont fondées sur des principes qui, de droit, ne sauraient rappeler leur origine présumée dans l'expérience sensible, faute de perdre la généralité et la nécessité qui déterminent la valeur de leurs concepts. Or cette objection est répétée en site empiriste et elle engendre une tension essentielle : on doit penser dans leur stricte originalité des principes qu'on devrait pourtant réduire au rang d'abstractions dérivées. Chez les auteurs qui nourriront Kant, l'analyse prend alors pour objet les relations des sciences constituées les unes avec les autres, plutôt que les premiers pas de l'esprit: l'effectivité des concepts plutôt que la puissance du sujet. Les pôles distingués dans cet ouvrage - un empirisme de la genèse et un empirisme de la constitution - révèlent ainsi la véritable urgence d'oppositions fondamentales en philosophie de la connaissance.