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La notion d'énergie est particulièrement opératoire pour étudier la littérature des trois derniers siècles. Elle est abordée ici à la fois dans son versant thématique, dans son versant formel (stylistique), et dans son versant méta-littéraire (l'énergie de l'écriture, l'énergie créatrice, et aussi l'énergie dans l'acte de lecture). Nous rencontrerons la problématique de la contradiction entre l'épuisement de l'énergie et le désir d'une énergie inépuisable, particulièrement au XIXe siècle du fait de l'arrière-fond épistémologique que constitue la thermodynamique : le principe de l'entropie prévoit l'épuisement de l'énergie libre (disponible) d'un système, qui est dépensée irréversiblement au cours du temps. A cela s'est opposé le rêve du mouvement perpétuel, de l'énergie inépuisable... La création littéraire peut-elle être envisagée comme une tentative néguentropique ? La question de l'énergie débouche aussi assez vite sur la nécessité d'une problématisation éthique. Car si l'énergie peut être créatrice, elle peut aussi être destructrice. L'oeuvre littéraire peut-elle échapper au risque de véhiculer une énergie destructrice ? Du côté de la réception de l'oeuvre littéraire, l'action de la lecture (au double sens de l'action effectuée par le lecteur dans sa lecture, et de l'action effectuée par la lecture sur le lecteur) implique aussi une énergie, une energeia comprise étymologiquement comme mise en oeuvre voire passage à l'acte. Nous nous pencherons ici sur des textes littéraires et critiques qui thématisent ou théorisent ce que nous pouvons appeler une énergétique de la réception. Le tournant pragmatique qui s'est développé dans les études littéraires depuis les années 1980 nous a rendus sensibles aux effets éthiques et existentiels des textes dans la vie même des lecteurs. Quelles nouveautés la modernité littéraire a-t-elle apportées à la lecture en termes d'énergie ?