Dans le cadre de cette vie provinciale dont il excelle à mettre en scène les drames cachés, Jean-Jacques Gautier nous présente ici un homme à la fois banal et énigmatique : Léonard Bréviaire. Un original, un égoïste, un prétentieux, disent les gens ! Peut-être, mais la dynastie Bréviaire possède une importante affaire de pêcheries dans un port de l'Atlantique. Léonard est séparé de sa femme. On ne lui connaît qu'une liaison un peu étrange. Pourquoi cette vie sans éclat, sans joie ni ambition ? C'est là ce qu'on appelle " un homme fait ". Mais où, quand, comment, par qui, de quoi et pourquoi ? A l'instant où le lecteur commence à se poser ces questions auxquelles en principe le roman devrait répondre, l'auteur paraît renoncer à l'écrire. Il interrompt sa narration pour nous dire la vérité, toute la vérité, rien que la vérité sur son héros. Car Léonard Bréviaire existe. Jean-Jacques Gautier nous conte les circonstances de leur rencontre dans une ville d'eaux. Il explique ce qui l'a attiré et intrigué dans ce curiste pas comme les autres. Et le récit, cessant d'être un roman, devient une simple relation. Nous apprenons ainsi, par fragments, ce qu'a été l'existence de cet homme qui ne se confie pas toujours sincèrement, et qui tantôt s'accuse, tantôt se cherche des excuses... qu'on ne lui découvrira pas forcément lorsqu'il le souhaiterait. Oh ! Il y a bien des explications : un mariage " de conscience ", une jeunesse comprimée, une vocation contrariée, des rêves étouffés, jusqu'au drame incertain, tout cela n'éclaire-t-il pas le caractère de Léonard Bréviaire. Sans ce passé, e-t-il été un autre ? Un personnage de roman se justifie, mais un vivant...