Depuis l'Antiquité, l'Inde abrite des communautés juives qui ont toujours pratiqué leur religion en toute liberté et dont la caractéristique, au contraire des autres diasporas, est de n'avoir jamais souffert d'antisémitisme. Quatre groupes se répartissent dans l'ensemble du pays : les juifs de Cochin, composés de Noirs et de Blancs, commerçants actifs établis depuis le roi Salomon dans le Kérala et parfaitement assimilés à la société indienne ; les Bene Israël, à l'origine presseurs d'huile, longtemps coupés du monde juif et considérés comme une des dix tribus perdues après la destruction du Temple de Jérusalem, présents surtout à Bombay et à Calcutta ; les Baghdadi, venus du Moyen-Orient au XVIIIe siècle, parfois enrichis par la vente de l'opium - alors légale - et plus proches des Européens ; les Mizos, enfin, aux frontières de la Birmanie, autrefois farouches guerriers et coupeurs de tête, revendiquant depuis peu leur appartenance au judaïsme et se prétendant mystérieux descendants de la tribu de Manassé. Dans ce livre pionnier, Monique Zetlaoui étudie l'histoire et les traditions de ces juifs indiens fort bien intégrés dans le système des castes et éclaire leurs relations, d'une part, avec les divers occupants du pays - les Portugais accompagnés de la sinistre Inquisition, les Hollandais, puis les Britanniques - d'autre part, avec les nationalistes indiens. Elle met en évidence leur rôle constant dans la vie de la Péninsule, tout au long des siècles, et souligne les particularités de leur judaïsme. Aujourd'hui beaucoup de ces juifs ont émigré et, paradoxalement, connaissent souvent des difficultés à faire admettre leur judéité par certains de leurs coreligionnaires.