Comment prendre le pouvoir, dans une démocratie, quand on n'a aucune chance de gagner les élections, sans pour autant vouloir instaurer une dictature ? Problème a priori insoluble. Pourtant, dans les années 50, le général de Gaulle trouve la solution.
A l'époque, gaullistes et extrême droite ne forment qu'une seule famille les nationaux. Leur but est le renversement de la IVe République. Pour y parvenir, ils choisissent d'aggraver et de pourrir les crises qu'affronte le pays. La plus explosive, la guerre d'Algérie, sera la bonne : les gaullistes poussent l'armée à basculer, ce qu'elle fera le 13 mai après que les activistes ont pris d'assaut le Gouvernement général d'Alger. En collaboration avec l'état major gaulliste, les militaires organisent la sécession de la Corse, puis montent un projet de débarquement sur Paris. C'est l'opération Résurrection. Devant la menace de guerre civile, l'Assemblée nationale cède. Elle donne les pleins pouvoirs à de Gaulle, puis vote sa propre dissolution pour que s'élabore la constitution de la Ve République.
Cet événement majeur de l'Histoire de France est quasiment absent des livres d'Histoire. On ne le commémore jamais. C'est l'autre grand tabou de la France contemporaine, après celui de Vichy. Quarante ans après, l'évidence s'impose malgré tout : la naissance de l'actuelle République n'a été possible que grâce à un coup d'état d'un type nouveau, perpétré avec le concours de l'extrême droite et des forces de sécurité du pays.
En racontant la genèse et le déroulement de ce coup d'état, Christophe Nick met en évidence une technique simple et efficace de prise de pouvoir dans une démocratie moderne. Technique qui, aujourd'hui, compte des émules aux quatre coins du globe. Cette enquête s'accompagne d'un petit "manuel du coup d'état démocratique" en onze leçons, intercalées entre chaque chapitre, qui pourrait passer pour un jeu amusant s'il ne démontrait pas l'extrême fragilité des démocraties.