" Sur l'écran, une enfant blonde est apparue, qui errait d'une pièce à l'autre dans un appartement jonché de milliers de mégots. Ces derniers jours, les chaînes publiques diffusaient fréquemment cette publicité frappante contre le tabagisme passif, commandée par le ministère de la Santé. Comme tout un chacun, l'indignation me submergeait quand j'imaginais le nombre de cigarettes inhalées malgré elle par cette fillette angélique. Récemment, dans un hebdomadaire, un journaliste tenait le tabac pour une arme de destruction massive à éradiquer. En ce moment, les pouvoirs publics luttaient sur tous les fronts, car ils lançaient également une campagne de prévention contre la consommation d'alcool chez les femmes enceintes. Idéologiquement, je ne savais guère où me situer. Quelques voix redoutaient une dérive hygiéniste à l'américaine. Au desk, cependant, les collègues applaudissaient avec enthousiasme. Non sans raison, il faut l'admettre. Personne ne souhaitait mettre au monde un enfant difforme et encore moins crever avant l'âge, dans d'infinies souffrances, d'un cancer du poumon provoqué par les cigarettes des autres, fussent-ils ses parents. La mort a quelque chose de tout à fait inacceptable quand on y réfléchit un peu. "