1717. Antoine Watteau vient de rendre son morceau de réception à l'Académie royale de Peinture et de Sculpture : le Pèlerinage à l'île de Cythère. L'extraordinaire succès que connaît la représentation de couples en partance pour l'île de l'Amour a contribué à faire de ce thème une véritable métaphore de la culture française du premier XVIIIe siècle. Si quelques auteurs du Siècle des Lumières s'empressent de glorifier l'art du peintre de Valenciennes, les pèlerins pour Cythère qui peuplent la littérature française du XVIIIe siècle appartiennent pourtant à une toute autre tradition. Poésies néo-précieuses, romans libertins et voyages allégoriques sont autant de formes littéraires sollicitées par les nombreux écrivains du XVIIIe siècle qui se sont embarqués pour l'île de Vénus. Etrangers tant aux rêveries de Verlaine qu'aux cauchemars de Baudelaire et de Nerval, les textes de cette anthologie plongent au coeur d'une mémoire lettrée qui remonte aux contrées allégoriques chères à Madeleine de Scudéry, au Songe de Poliphile de Francesco Colonna, jusqu'aux pèlerins amoureux du Moyen Age.
Sébastien Drouin consacre ses recherches à la littérature française des XVIIe et XVIIIe siècles. Il est notamment l'auteur de Théologie ou libertinage ? L'exégèse allégorique à l'âge des Lumières (Champion, 2010).