" Fais ce que tu veux tant que tu ne portes pas atteinte à la liberté d'autrui. " Tel est semble-t-il le credo de notre société en matière de mœurs, chaque fois que se pose une question soulevant un enjeu moral. Ce consensus se traduit juridiquement par l'effacement si ce n'est la disparition de la notion de bonnes mœurs. On peut néanmoins s'interroger sur la légitimité de cet effacement. Le droit français peut-il faire l'économie de toute référence à une norme autre que le respect de la liberté individuelle ? De fait, le déclin de la notion de bonnes mœurs révèle une mutation considérable non seulement du droit (en particulier dans son articulation avec la morale), mais aussi du rapport de l'individu à la norme dans la société contemporaine. Dans ce contexte, la dignité de la personne humaine serait-elle à même d'intégrer un critère moral dans le droit, remplaçant ainsi les bonnes mœurs ? A travers l'étude de thèmes aussi divers que le mariage des personnes homosexuelles, l'adoption d'enfants par des couples homosexuels, la protection des mineurs contre la pornographie, la réforme du divorce, la censure..., Bénédicte Lavaud-Legendre montre que la disparition des " bonnes mœurs " s'accompagne paradoxalement d'une pénalisation et d'une juridicisation croissantes des rapports humains.