"Celui qui, à l'école communale de ma Provence natale, m'aurait dit que j'allais un jour écrire une pièce de théâtre avec mon professeur de lettres, je ne l'aurais pas cru. Celui qui, passés mes vingt ans, alors que je gravais des croix de Lorraine sur le mur de ma cellule, m'aurait dit que je publierais les Mémoires d'espoir du général de Gaulle, je ne l'aurais pas cru. Celui qui, à l'approche de la cinquantaine, m'aurait dit que j'allais adapter et dialoguer Les Rois maudits de Maurice Druon, je ne l'aurais pas cru. Celui qui m'aurait annoncé que Gérard Oury s'embarquerait avec moi pour Le Corniaud, puis La Grande Vadrouille, je ne l'aurais pas cru. Celui qui, plus tard, m'aurait annoncé que le président de la République me donnerait une "mission de délivrance" d'une chaîne de télévision que je baptiserais Antenne 2, je ne l'aurais pas cru. Mais l'essentiel, pour chaque vivant, ce sont les moments intraduisibles, les illusions qu'il faut quitter, la foi tenace en quelques choses rares et le plaisir de vivre "sous le signe d'amitié", comme le disait Carco. Cela aussi je ne l'aurais pas cru. Le véritable auteur de Mémoires, c'est le hasard. C'est à lui que je dédie celles-ci". .