« J’avais enfin quitté la marchande de sommeil, et trouvé pour quelques jours refuge chez un ami d’ami, à Vincennes, non loin de la tour où le marquis de Sade passa quelques années, mais décidément Paris m’était impossible : jamais je ne trouverais un bail, personne ne voudrait louer ne serait-ce qu’un studio à un écrivain sans le sou, et surtout sans fiche de paye – le sésame des temps modernes –, il me fallait repartir, au hasard Balthazar, encore une fois. Je n’étais plus à ça près… J’étais devenue une pierre qui roule – like a rolling stone ! Dans les rues de Vincennes enténébrées, casque sur les oreilles, je chantais à tue-tête la chanson de Dylan ; le marquis de Sade était loin, et je n’étais pas Justine, hélas, juste un vague ersatz de la Nadja de Breton : une âme errante. » Forcée de quitter son domicile parisien, Élise, double littéraire de l’auteur, se débarrasse de tout ce qu’elle possède, y compris de ses livres. Affranchie du matériel, elle vit au jour le jour, s’en remettant à ses désirs, à sa curiosité d’esprit, et à la bonté d’étrangers. Chaque décision devient une épreuve, où l’heureux dénouement le dispute au tragique. D’une bicoque à Saint-Nazaire à une plage guyanaise, d’une marchande de sommeil à un flic-écrivain, d’amitiés solides en relations virtuelles, d’étreintes tarifées aux blessures amoureuses, de nuits à la belle étoile à l’enfermement dans un cloître : Élise va et vient, bousculée par le hasard, débordée par ses choix, chahutée par ses rencontres. Voici un livre écrit sur le fil, comme un numéro d’équilibriste – un fil tendu par l’urgence, la nécessité, et un goût certain du risque –, qui rend compte magnifiquement de la fragilité de l’existence.
Née à Nancy, Élise Fontenaille a été journaliste au Canada, puis en France. Elle se consacre aujourd'hui à l'écriture et a publié de nombreux romans, dont Le Palais de mémoire (Calmann-Lévy, 2011).