L'évolutionnisme, l'organicisme, le darwinisme social, l'anthropologie des " races ", l'anthropologie des criminels, l'histoire naturelle de l'homme... Au XIXe siècle, les théories qui prétendent fonder une science de l'homme et de la société en s'appuyant sur les sciences de la vie se multiplient, à travers des discours dont les contenus peuvent être très contrastés. Comment expliquer ce mariage, aux conséquences parfois tragiques ? Un tel fourmillement de théories peut-il être ramené à quelque fond unitaire ? Le présent ouvrage entend aborder ces questions dans une perspective et un contenu qui associent la méthodologie de la sociologie des sciences d'inspiration " cognitiviste " (Raymond Boudon), et les acquis de l'histoire et de la philosophie de la biologie (Henri Daudin, Georges Canguilhem, Michel Foucault, Bernard Balan ou Jean Gayon). L'objectif est de montrer qu'il existe en réalité, tout au long du XIXe siècle, un vaste champ de pensée commun, dans lequel se déploient conjointement les discours sur l'homme et la société d'inspiration biologique et les parties les plus spéculatives des sciences de la vie, plus précisément, de l'anatomie comparée. Ce champ de pensée, totalement étranger, dans ses fondements philosophiques, aux inspirations essentielles du darwinisme, est centré sur les notions d'organisation, de développement et de classification. Dans cet ouvrage, destiné aux sociologues et aux historiens des sciences aussi bien qu'aux philosophes et aux biologistes, l'auteur propose de retracer l'histoire de ce champ. D'abondants développements sont consacrés aux travaux de Georges Cuvier, qui joue dans cette histoire un rôle initiateur crucial, quoique ambivalent et complexe.