Depuis la perte irréparable qu'ont éprouvée l'Université française et les sciences sociales, - depuis la mort d'Emile Durkheim, - j'ai eu l'occasion de faire à la Sorbonne, à diverses reprises, des cours élémentaires de sociologie générale, pour un public où se mêlaient les futurs maîtres de l'enseignement secondaire et les futurs maîtres de l'enseignement primaire. Ces sortes de cours ne peuvent guère être que des revues un peu rapides. On vole de sommet en sommet, sans avoir le temps de descendre au détail. On suggère plutôt qu'on ne démontre. On pose plus de problèmes qu'on n'en résout. Tels quels, il m'a semblé que les résumés de ces cours pouvaient composer un livre actuellement utile. Aujourd'hui, plus que jamais - dans le désarroi intellectuel et moral qui suit la guerre - les esprits sont nombreux que la sociologie attire. Ils trouveront dans ce livre, ordonnées autour de quelques thèses centrales, un certain nombre d'informations touchant les origines ou l'évolution de la religion et de la morale, de la science et de l'art. A méditer les conclusions qui se dégagent de ces informations mêmes, ils vérifieront que le "matérialisme" ou même le "scientisme" ne sont nullement le dernier mot de la sociologie : bien plutôt, nous fournit-elle de nouvelles raisons de respecter les diverses formes de l'idéal que les sociétés ont pour principal office de faire vivre.