L'essai de Francis Kaplan fournit une introduction philosophique sans équivalent aux avatars du concept de vie depuis l'Antiquité grecque jusqu'aux controverses actuelles sur le hasard et la nécessité, l'émergence de la vie et les rapports entre conscience et matière. Qu'est-ce que la vie ? Ce problème s'est posé à l'homme depuis des millénaires, et malgré les immenses progrès de la biologie, le statut du vivant reste, quoiqu'on en pense, toujours aussi incertain : les tentatives de réduction de l'organique au physico-chimique laissent toujours un résidu inexplicable, tandis que les définitions de la spécificité du vivant hésitent entre la tautologie et l'irrationnel. L'étude du vivant, contrairement aux autres sciences, ne peut pas se passer de l'idée de finalité. Derrière les notions de fonction, d'organe, d'adaptation ou de pathologie, rôde toujours la question : à quoi sa sert ? Mais les biologistes ont un peu honte d'une particularité qui semble ramener les fondements de leur discipline aux idées naïves du sens commun. L'essai de Francis Kaplan prend ces problèmes à bras-le-corps et fournit une introduction philosophique sans équivalent aux avatars du concept de vie depuis l'Antiquité grecque jusqu'aux controverses actuelles sur le hasard et la nécessité, l'émergence de la vie et les rapports entre conscience et matière. Il montre que ni la finalité théologique ni la réduction de la vie à la matière, ni les théories vitalistes n'apportent une réponse satisfaisante à l'énigme de la finalité biologique. Quant à l'explication par le rôle du hasard, même associé à la sélection naturelle, une analyse probabiliste sérieuse montre qu'elle se heurte à des difficultés insurmontables. Le fait que la vie soit compréhensible reste donc incompréhensible. C'est une leçon d'humilité pour la raison, mais cela n'empêche pas la biologie de fonctionner et de progresser. Entre le danger d'une dérive théologique et le carcan de la stricte orthodoxie darwinienne, il y a donc une place pour une définition pratique de la vie qui rende mieux compte du travail effectif des biologistes.
Francis Kaplan est directeur du département de philosophie de l'université de Tours. Il a publié plusieurs ouvrages dont La Vérité et ses figures (Aubier-Montaigne, 1977). .