... La Tortue : on pourrait penser qu'il s'agit là de l'îlot des Antilles, du repaire célèbre de boucaniers et de " gentilshommes de fortune " des XVIIe et XVIIIe siècles. Il n'en est rien, et cette " tortue " est toute symbolique. Elle n'en est pas moins la clé d'aventures qui ne le cèdent en rien à celles des Frères de la Côte. De la Catalogne à la Tunisie et à l'archipel Dahalak - au large de l'Ethiopie -, du temps de Philippe IV d'Espagne et des barbaresques à nos jours, les héros et les héroïnes de ce roman sont entraînés dans un tourbillon d'enlèvements, de naufrages et de machinations qui sembleraient invraisemblables si l'on ne savait qu'aujourd'hui encore, les pays riverains de la mer Rouge restent, à bien des égards, aussi secrets qu'il y a trois cents ans. Le vol sifflant des avions à réaction laisse immobile le sable des déserts soudanais et yéménites, et ne fait pas se hâter les pèlerins en marche vers la Mecque - pèlerinage dont Henry de Monfreid donne ici une étonnante description. Ces pages - parmi d'autres tout aussi vivantes - soulignent la maîtrise avec laquelle ce grand conteur sait associer la fiction et le document, l'imagination la plus romanesque à ses souvenirs les plus authentiques.