Depuis trente et un ans, dont vingt-six sous la dictature, le destin du Zaïre est mêlé, sinon confondu, avec celui de son président, Mobutu Seke Seko. Cet homme, contemporain de Marcos, de Duvalier, du Shah d'Iran, est l'un des derniers " dinosaures ", le sous-produit de la guerre froide dans le tiers-monde, l'allié de l'Occident et de ses services secrets... Encombrant, anachronique, il s'enferre aujourd'hui dans ses contradictions, préférant régner sur des ruines plutôt que de passer la main. Qui est cet homme, considéré comme l'un des plus riches du monde ? Comment le fils d'un cuisinier, devenu sergent dans l'armée coloniale, a-t-il pu incarner un tel pouvoir ? Sur quelle pyramide a-t-il construit sa puissance ? L'Etat zaïrois n'est rien d'autre qu'un échafaudage d'injustices. Vivant sur un coffre-fort de matières précieuses, les Zaïrois sont parmi les plus pauvres d'Afrique et le développement est la dernière des préoccupations du régime... Pendant un quart de siècle, les Etats-Unis, la France et, bien sûr, la Belgique ne l'ignorent pas, mais se taisent. Mobutu, fidèle à l'Occident, n'hésite pas à obliger ses amis à soutenir la politique américaine en Angola, française au Tchad, belge au Rwanda. S'accommodant de la corruption du régime, des violations des droits de l'homme, voire de la faillite économique du pays, les Occidentaux le soutiennent, voient en lui une garantie contre le chaos. Jusqu'à ce que le vieil allié, une fois terminé son rôle historique, devienne véritablement gênant. Comment alors s'en débarrasser, l'obliger à céder le pouvoir, et au profit de quelle opposition ? Colette Braeckman est journaliste au quotidien Le Soir à Bruxelles et collaboratrice au Monde diplomatique. En plus de nombreux reportages à travers le monde, elle se consacre surtout à l'Afrique et plus particulièrement au Zaïre, Bruxelles étant à ce titre un poste d'observation privilégié.