L'approche de la notion de justice est désormais avant tout tributaire de la tension que l'époque contemporaine a instaurée entre deux impératifs: ne pas trahir l'exigence d'égalité, valeur de référence traditionnelle, tout en faisant droit à la différence, prétexte à mille revendications. Complémentarité ou opposition? Pour échapper à l'oscillation aveugle, un éclaircissement historique et un effort conceptuel s'imposent. Cet ouvrage relève le défi. Avec le stoïcisme et le christianisme, l'avènement de l'égalité universelle a renversé les anciens repères fournis par une conception hiérarchique et cosmique de la justice. Ensuite, les théories du droit naturel ont imposé la tâche difficile de fonder l'égalité libérale sur les bases de l'individualisme et de l'artificialisme. Enfin, l'ère démocratique, ouverte par la révolution des droits de l'homme, a inoculé aux sociétés modernes une passion aveugle pour l'égalité des conditions. En bout de parcours, la théorie de la justice de John Rawls, dont l'œuvre apparaît comme une synthèse des valeurs libérales et démocratiques que les sociétés occidentales ont assimilées, et comme une tentative pour en assumer tous les enjeux sociaux et politiques, permet à l'auteur de dégager les grandes lignes du débat contemporain et d'avancer de nouveaux éléments de réflexion. Ce livre s'adresse aux étudiants de philosophie de premier et second cycles, aux élèves des classes préparatoires aux grandes écoles, aux candidats aux concours de recrutement. Au-delà, il intéressera tous ceux qui veulent bien admettre que le souci de justice a d'autres exigences que le rabâchage d'idées toutes faites.
Sophie Guérard de Latour, ancienne élève de l'École Normale Supérieure, agrégée de philosophie, enseigne à l'université Michel de Montaigne-Bordeaux-3.