Par quatre arrêts en date du 1er décembre 1995, l'assemblée plénière de la Cour de cassation abandonne l'exigence d'une fixation du prix lors de la conclusion du contrat ou, à défaut, de modalités de détermination extérieures à la volonté d'une seule des parties. Est également déclarée valable la clause conférant à l'un des contractants le pouvoir de fixer le prix ultérieurement. Ce pouvoir de fixation du prix est désormais simplement contrôlé, par la technique de l'abus ouvrant droit à la résiliation du contrat, ou bien à l'indemnisation de la victime du prix abusif.
Une telle modification du droit positif constitue un événement considérable, aux incidences multiples et, en l'état, encore largement hypothétiques. Les interrogations l'emportent en effet sur les certitudes, de la validité du contrat sans clause de prix aux modalités d'identification de l'abus, en passant par les conditions et les effets de la résiliation, la possibilité de la cumuler avec une indemnisation, la conciliation entre règles communes et règles spéciales de détermination du prix, etc.
Après la présentation du contenu même de ces décisions, le nouveau dispositif est envisagé dans son contexte et ses enjeux économiques. Puis les arrêts du 1er décembre 1995 sont analysés à l'aune des trois domaines qu'ils concernent directement et profondément : les contrats-cadre, les relations de dépendance, le droit commun. La présentation des solutions étrangères - allemandes spécialement - permet ensuite de mesurer si le revirement de jurisprudence est effectivement de nature à rompre l'isolement du droit français sur ces questions. L'ensemble des enseignements énoncés dans ces multiples approches est rassemblé en une synthèse qui fait le départ entre les certitudes acquises, les perspectives probables et les interrogations persistantes.