L'extrême gauche française est une énigme. Marginale, elle est pourtant jugée influente. De fait, depuis l'effondrement du communisme d'Etat, qu'elle a farouchement combattu, elle paraît revenir sur le devant de notre scène politique. Le déclin du Parti communiste, son frère ennemi, constitue pour elle une sorte de triomphe historique ; l'apparition d'un mouvement altermondialiste lui offre des opportunités inédites, donnant un nouveau souffle à quelques-uns des thèmes qui lui sont chers ; de plus, cette gauche radicale a su prendre part à des combats couronnés de succès, depuis les mobilisations collectives de l'hiver 1995 contre la réforme des retraites jusqu'aux manifestations hostiles au CPE du printemps 2006, en passant par l'opposition au traité européen, rejeté par référendum le 29 mai 2005. Et enfin, des résultats électoraux exceptionnels ont donné à l'extrême gauche une visibilité spectaculaire, comme en témoigne le 21 avril 2002. La question se pose donc de savoir si l'extrême gauche française est moribonde ou renaissante.
Dominique Reynié est professeur des Universités à l'Institut d'études politiques de Paris, chercheur associé au Cevipof et directeur de l'Observatoire européen des élections à la Fondation Robert Schuman.