Seule esthétique générale de Nietzsche publiée en français, cette synthèse thématique met en lumière ses multiples évolutions, jusqu'à présent difficilement saisissables. La démarche est pédagogique et didactique afin de permettre au lecteur d'effectuer par lui-même le bilan des principaux acquis de cette recherche. Fondé sur l'examen exhaustif des écrits philosophiques de Nietzsche, le traitement informatique des fragments posthumes a notamment permis d'apporter une vision plus précise et systématique de ces transformations et de leurs enjeux philosophiques. Ainsi les figures d'Apollon et de Dionysos ont évolué dans le sens d'un devenir apollinien de Dionysos. Les notions de rêve et d'ivresse se sont modifiées dans le sens d'une dissolution de leur antagonisme. Le statut accordé par Nietzsche à la musique et aux arts plastiques s'est transformé dans le sens d'une prééminence du modèle plastique sur le modèle musical à partir de sa rupture avec Wagner. Une esthétique classique fondée sur la valeur vitale de la belle illusion et du mensonge optimiste s'est substituée à une esthétique négative, c'est-à-dire une esthétique du sublime et de la dissonance exprimant le pessimisme philosophique. Enfin, le classicisme très singulier de Nietzsche fait l'objet d'une définition qui rectifie certaines théories actuellement fort répandues et néanmoins erronées (on y oppose en particulier la notion de formalisme classique à celle d'hyperclassicisme).
Cette esthétique défend une approche humaniste de l'art compris comme une sagesse récusant simultanément la religiosité et le cynisme. Elle affirme l'art comme le grand stimulant de la vie par-delà la vision du caractère tragique de l'existence.