Les organisations de jeunesse, quelle que soit leur orientation politique, sont bien des lieux d'apprentissage des ficelles du métier politique, métier " qui ne s'apprend pas ". Pourtant, les organisations de jeunesse des partis politiques, a fortiori celles des partis aujourd'hui dominants dans l'espace politique français, étaient jusqu'à la thèse de Lucie Bargel mal connues. [...] C'est l'incorporation progressive des savoir-faire et des savoir-être officiels et officieux de la profession politique qu'étudie Lucie Bargel, contribuant ainsi tout d'abord au renouveau des travaux sur la socialisation, politique ou non. Et elle le fait avec une double exigence qui participe de la valeur de cet ouvrage : celle de la comparaison entre une organisation de droite et une organisation de gauche ; celle de la multiplication des méthodes puisqu'on trouvera ici aussi bien des archives, une analyse quantitative de questionnaires passés auprès des membres de ces mouvements de jeunesse, qu'une longue observation au sein du MJS et des Jeunes Populaires. [...] En effet, seule une observation longue, couplée à l'usage de la notion de carrière, permet de décrire ce qui ne l'avait jamais été jusque-là : l'incorporation progressive des règles formelles et informelles, des plus dicibles aux plus déviantes. [...] L'ouvrage de Lucie Bargel contribue à l'analyse de la professionnalisation et de la socialisation politiques, comme aux gender studies. Il participe enfin de la sociologie des institutions, parce qu'il montre tout du long ce que les institutions " font " à leurs membres. Mais aussi parce que Lucie Bargel parvient à décrire sous quelles conditions historiques et politiques l'accord ou le désaccord avec la tutelle partisane autorise les organisations de jeunesse à devenir ou non des filières de professionnalisation politique. " Frédérique Matonti.