La vie de peu de réformateurs a fait l'objet d'autant de recherches historiques que celle de Jean Calvin : les pages qui lui sont consacrées se comptent par dizaines de milliers, nombre qui est à la hauteur de l'importance du personnage, mais qui reflète aussi parfois une minutie de détails proche de l'idolâtrie. Cependant les biographies de ce Français exceptionnel restent peu lues, étant en général épaisses, écrites il y a longtemps, et non rééditées. Celle de Williston Walker (1860-1922), historien américain de la Réformation ayant enseigné à l'université de Yale, mérite de l'être. Traduite par Nathanël Weiss (1845-1928), rédacteur du Bulletin de la Société de l'histoire du protestantisme français, elle n'a pas le charme littéraire de la prose de Merle d'Aubigné ou de Bungener, mais elle offre une abondance de sources, qui fait comprendre que l'auteur a tout lu sur le sujet, sans toutefois tomber dans la recherche excessive d'Emile Doumergue. Elle se distingue surtout par sa grande hauteur de vue, qui lui permet d'évaluer honnêtement les qualités et les défauts du héros réformé. La tragédie de l'épisode de Michel Servet est à cet égard particulièrement bien traitée ; le portrait moral de Calvin tiré à la fin de l'ouvrage emporte notre conviction.