« Il y a beaucoup d’enfants qui ne naissent jamais, et des adultes qu’on n’a pas mis au monde. La mort a fermé les yeux des disparus et ouvert ceux des survivants, tous deux sont à présent parfaitement lucides. J’aimerais l’être moins. »Celle qui dit « je », c’est Angèle Videau, soeur d’Arielle, fille d’Armelle et du « père », une apparition dans ce roman de femmes. Des femmes sur trois générations, de Mané à Armelle, d’Armelle à Angèle. Trois générations, pas une de plus.On rencontre Angèle dans la salle d’attente d’un cabinet médical, les mains posées sur un ventre qu’elle a gonflé d’espérance. Alors que se déploie sous ses yeux le ballet des futures mères, des jeunes enfants et de celles qui les ont enfantés, Angèle s’adresse à Éric. Ce prince Éric qu’elle désire de toutes ses forces et porte en elle, elle tente de l’apprivoiser. L’occasion de convoquer les rêves, les souvenirs et de combler les places laissées vides. Pourquoi les désamours et à quel point le manque ? A-t-on « raté » sa vie quand on ne la donne pas ? Il y a les questions, toutes les questions d’Angèle et qui demeurent sans réponse.Car J’attends, c’est la sensation d’une carence ; le coeur bat en sourdine, la laideur, celle qui ne s’altère pas finit par saisir d’effroi, le corps est sec et, si l’on n’y prend garde, bientôt, dans cette famille qui s’amenuise comme une peau de chagrin, les morts auront supplanté les vivants. Angèle aimerait être moins lucide mais pour Éric, elle a tout déballé. Un regard sans filtre, quasi clinique, qu’elle offre sur les siens et sur elle-même et qui révèle, dans une violence contenue et dans le sang, parfois, les secrets, les envies, les pensées honteuses, tout ce qu’on n’a pas su et pas pu dire.J’attends est un roman qui, à travers le point de vue d’une jeune femme et les brèves d’existence de celles qu’elle raconte, les anecdotes, le quotidien, réussit à approcher l’universel : la maternité, la féminité, le lien du sang et la mort.