Le paradoxe de l'histoire, c'est qu'elle est ce lieu où le récit agit sur l'action et vient en changer la face. Ainsi la narration de l'histoire passe-t-elle par une histoire des narrations.
Entre deux guerres mondiales, le récit idéologique de l'extrême-droite italienne et allemande raconte l'histoire sur la base de certains mots : État totalitaire, État total, qui vont déboucher sur la plus grande extermination de tous les temps. Cette narration n'est pas simplement, ou strictement, historienne. Elle raconte les narrations qui ont rendu possible cet objet inracontable, nommé le Reich hitlérien. Car voici l'essentiel : ce sont les coupes, ce sont les rejets d'une chaîne de langage à une autre - c'est une sorte de prosodie des langues politiques que l'on trouve, ici, liée à l'engendrement de l'action. Nouvelle édition, augmentée d'un avant-propos : Le cyclotron Göring et les langages de l'État total.