Je veux comprendre. Comment l'on passe d'une naissance dorée, les fées penchées sur le berceau du fils de comte, futur comte, à la maison du mort maudit. La période qui sépare la mort de Gabriel de son enterrement, un moment suspendu que le hasard a voulu très long sera occupée à une seule obsession : révéler le noeud de cette histoire, de cet homme, de ce couple, retracer le cours d'une vie à l'envers, en partant de la fin. Mettre à jour cette foule de motifs imperceptibles que l'on résume par une lâche facilité du mot de destin, cette succession de hasards et d'événements qui a fait d'un homme à l'intelligence, à la culture et au talent rares, un vieillard pauvre, déchu et ruiné, mort dans la saleté. Je sais déjà que je ne pourrai démêler ce qui relève de la fatalité, de la malchance, de ses propres erreurs ou fautes. A qui veut remonter le temps, il faut devenir peintre, rendre avec des couleurs, des jeux d'ombres et de lumières, la complexité d'une personnalité qui ne se contentait pas d'être curieuse, qui était fascinante et vertigineuse - pour comprendre le passé d'un génie, d'un de ces esprits qui ajoutent de la lumière sur la scène et de la beauté dans le monde, dont l'âme comportait mille reflets sombres. Cette histoire tient de la tragédie.